vendredi 28 septembre 2007

Tu seras un avocat, mon fils !

Une fois n’est pas coutume, je n’écris pas un post à proprement parler et me contente de citer cet écrivain talentueux qu’est Rudyard Kipling. Britannique de son état, il a écrit un texte qui par beaucoup d’aspect m’évoque la profession d’avocat telle que je la perçois actuellement : une profession qui exige de la détermination, de l’abnégation, de la mesure, de l'introspection, de l’honnêteté et qui nous oblige à faire face à de grandes victoires comme à de lourdes défaites :

« Si tu peux voir détruit l'ouvrage de ta vie
Et sans dire un seul mot te mettre à rebâtir
Ou, perdre d'un seul coup le gain de cent parties
Sans un geste et sans un soupir ;
Si tu peux être amant sans être fou d'amour,
Si tu peux être fort sans cesser d'être tendre
Et, te sentant haï sans haïr à ton tour,
Pourtant lutter et te défendre ;

Si tu peux supporter d'entendre tes paroles
Travesties par des gueux pour exciter des sots,
Et d'entendre mentir sur toi leur bouche folle,
Sans mentir toi-même d'un seul mot ;

Si tu peux rester digne en étant populaire,
Si tu peux rester peuple en conseillant les rois
Et si tu peux aimer tous tes amis en frère
Sans qu'aucun d'eux soit tout pour toi ;

Si tu sais méditer, observer et connaître
Sans jamais devenir sceptique ou destructeur;
Rêver, mais sans laisser ton rêve être ton maître,
Penser sans n'être qu'un penseur ;

Si tu peux être dur sans jamais être en rage,
Si tu peux être brave et jamais imprudent,
Si tu sais être bon, si tu sais être sage
Sans être moral ni pédant ;

Si tu peux rencontrer Triomphe après Défaite
Et recevoir ces deux menteurs d'un même front,
Si tu peux conserver ton courage et ta tête
Quand tous les autres les perdront,

Alors, les Rois, les Dieux, la Chance et la Victoire
Seront à tout jamais tes esclaves soumis
Et, ce qui vaut mieux que les Rois et la Gloire,

Tu seras un AVOCAT, mon fils ». ;-)

mercredi 19 septembre 2007

Plan(s) de carrière(s)

Depuis que je tiens ce blog, j’ai beaucoup parlé du fait de travailler au sein d’une grande structure anglo-saxonne comme de la voie royale pour gagner très vite beaucoup d’argent en exerçant cette profession.

Ce n’est évidemment pas le seul choix qui s’offre à vous si vous voulez allier profession d’avocat et rémunération confortable. Disons qu’en discutant avec la plupart des élèves avocats de l’EFB Paris, on finit par croire qu’il n’y a qu’une façon d’exercer ce métier. Le fait est qu’en tendant l’oreille et en rencontrant d’autres personnes, on s’aperçoit assez vite qu’il y a des élèves qui ne sont tout simplement pas attirés par le fait de travailler dans ce type de structure avec tous les inconvénients que cela implique (horaires, hiérarchie, etc).

Elles aspirent, à très court terme, à s’associer au sein d’un cabinet et considèrent qu’elles ne feront pas ce métier en travaillant plus de 10 heures par jour. Ce qu’elles ont de particulier vient du fait qu’elles ne sont pas moins déterminées que ceux qui sont prêts à tous les sacrifices pour intégrer une prestigieuse structure.

Elles souhaitent elles aussi faire leur trou rapidement et bien gagner leur vie. Seuls leurs plans de carrières diffèrent. Elles voient ce métier comme l’occasion d’exercer une profession en toute indépendance, sans une hiérarchie marquée et ne la conçoivent qu’ainsi.

Sans jugement de valeur au sujet de ceux qui décident d’intégrer une structure anglo-saxonne, elles me confient que cela ne leur donne pas envie et qu’en travaillant dans ces conditions elles s’ennuieraient et dépériraient en très peu de temps.

Quoi qu’il en soit, on a coutume de dire que travailler dans une petite structure présente deux avantages :

Vous avez la possibilité de développer une clientèle personnelle ce qui vous permet d’augmenter votre rémunération de façon substantielle. Clientèle personnelle qui semble exclue au sein d’une structure anglo-saxonne, faute de temps.

Outre le fait que vous soyez en contact avec le client, vous avez la possibilité de plaider les dossiers du cabinet. Privilège qui en structure anglo-saxonne ne revient bien souvent qu'aux collaborateurs counsel et autres associés du cabinet.

Le genre de petits détails qui ont, à n'en pas douter, leur importance quand vient le moment de faire un choix déterminant pour sa carrière d’avocat.

mercredi 12 septembre 2007

Au PPays de l’entreprise !

Mon PPI (projet pédagogique individuel) a donc débuté il y a plus de deux mois au sein du service juridique d’une structure dynamique et assez jeune.

Au fur et à mesure que le temps passe, l’expérience aidant, je me sens de plus en plus à l’aise. Les collègues sont devenus des « amis » et mon maître de stage qui semble assez satisfait par le travail que je produis n’hésite pas à me laisser libre de gérer seul les dossiers de A à Z et à me faire des compliments.

Cela constitue une différence fondamentale avec le cabinet d’avocat classique. Dans un cabinet d’avocats, il est très rare que les compliments pleuvent, comme si la tradition imposait au maître de stage de ne complimenter son stagiaire au motif que ce dernier pourrait prendre la grosse tête et se croire arrivé.

Plus le temps passe, plus je me sens conforté dans l’opinion que le métier de juriste d’entreprise et d’avocat sont deux métiers radicalement opposés. La pression que l’on subit au sein d’une entreprise est loin d’être là même que celle présente au sein d’un cabinet d’avocats.

Même si l’on attend de vous que vous fassiez du bon travail ainsi que des points réguliers sur ce que vous avez réalisé, les dead-lines impossibles à tenir sont pour ainsi dire inexistantes au sein du monde de l’entreprise. Cette différence de pression joue énormément sur l’état d’esprit des uns et des autres et sur l’ambiance inhérente au monde de l’entreprise.

D’ici quelques semaines, j’entamerai mon 3ème mois de stage au sein de cette entreprise, période à laquelle les stagiaires ont coutume de dire que l’on cesse d’apprendre et où l’on commence à s’ennuyer. Pour l’heure, je ne sens pas cet ennui me gagner mais le fait que l’on ait élargi récemment le champ de mes attributions y est sans doute pour quelque chose.

Ce stage, dont les horaires n’ont rien à voir avec ceux de cabinet d’avocats, me permet de faire plus de choses à côté et de profiter de moments de détente dont je risque d’être nostalgique quand débutera en janvier prochain, mon stage de fin de formation. D’ici là, j’en profite…

samedi 1 septembre 2007

Avocat à vie ? Avis d’avocats

Plus le temps passe, plus je m’aperçois que la profession d’avocat est l’archétype de celle que l’on idéalise énormément avant de l’exercer pour finalement tomber quelque peu de son arbre une fois qu’on l’intègre.
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On se rend d’abord compte en allant au tribunal ou en observant d’autres avocats à travers nos différents stages qu’ils ne sont pas tous brillants et talentueux (loin s’en faut). Ce constat n’a en réalité rien de bien surprenant puisque comme dans toute profession, il se devait d’exister de très bons, de bons, de moyens mais aussi de moins bons (pour ne pas dire de mauvais) avocats.

Au-delà, donc, de cette vraie fausse surprise, vous découvrez assez rapidement que même si le type de structure dans laquelle vous travaillerez y sera pour beaucoup, quoi qu’il arrive, vous ne pourrez pas exercer cette profession libérale moins de 10 à 11 heures par jour.

Là encore, il n’est pas vraiment surprenant d’apprendre qu’une profession libérale impose beaucoup plus d’heures de travail qu’un métier de juriste en entreprise soumis au 35 heures.

Là où cela se complique c’est dans la façon dont vous effectuez ces 11 heures de travail quotidien. Quand vous n’êtes qu’un élève-avocat la pression ou plutôt le rythme que vous impose votre maître de stage est déjà important . Quand vous passerez collaborateur, ce rythme deviendra d’autant plus important que vous devrez à votre cabinet un certain nombre « facturable » (au client) par an (environ 1300), qui réportées au nombre de jour dans la semaine équivaut à peu près à 6 heures par jour. Sur ce point, il est utile de préciser que les recherches se facturant rarement, 6 heures facturées n’équivalent pas à 6 heures de travail.

Le niveau d’exigence qui vous est imposé n’est quant à lui plus du tout lié au type de cabinet dans lequel vous officiez…il est tout simplement omniprésent dans cette profession. Partez du principe que ce métier est rempli d’avocats qui attendent ou attendront de vous que vous soyez brillant, rapide, efficace, volontaire et, pour ne rien gâter… aimable.

Si vous remplissiez tous ces critères, vous êtes sur la bonne voie, mais pour avoir une chance de terminer votre vie dans cette profession, il faut une capacité hors du commun de résistance à la pression.

Il existe deux types de pression.

Celle qui est liée aux horaires. Passez près de 13 heures (9h à 22h) dans un cabinet n’est pas évident pour tout le monde. Plus vous travaillez d’heure dans une journée plus vous devenez, la fatigue aidant, à fleur de peau et réceptif aux remarques de votre supérieur hiérarchique.

Celle liée à la pression psychologique qu'exerce sur vous ce même supérieur hiérarchique. Vous pouvez, en effet, travailler 10 heures par jour (9h30 à 19h30) et subir une pression de tous les instants qui vous empêche d’envisager de continuer de ce métier sauf à quitter d'urgence ce cabinet.

Même si je n’ai pas de statistiques, je m’aperçois en discutant avec des ami(e)s élèves-avocats que le facteur qui les pousserait le plus à décider de ne pas s’éterniser dans cette profession est la conscience qu’ils ont de ne pas vouloir travailler 5 jours sur 7 (voire plus) sous la pression des dead-lines beaucoup trop courtes voire surnaturelles imposées par un collaborateur ou un associé.

Dans ces conditions, et après 8 mois d'école, je commence à entendre certains de mes camarades (pourtant très motivés au départ), m’expliquer qu’ils iront au bout de la formation mais que si le stage de fin de formation se passait mal pour eux, en partie en raison du fait qu'ils se rendraient compte à cette occasion que ce métier ne colle pas à leur tempérament, ils n’hésiteraient pas à se réorienter vers une autre profession moins exigeante, notamment au niveau des horaires (juriste d’entreprise par exemple).

Comme dirait l’un de mes camarades de promo en citant Voltaire « il ne faut pas oublier que l’homme n’est pas fait pour travailler, la preuve c’est que cela le fatigue ».